Sommes-nous maîtres de notre destinée ? Une interrogation que nous pouvons nous poser un jour ou l’autre dans notre vie. Une de ces questions existentielles qui peuvent occuper notre esprit. Les circonstances qui peuvent nous pousser à nous poser ces questions sont variables et propres à chacun. Nous vivons dans un monde des plus étranges, des plus mystérieux et des plus complexes depuis le second big-bang qui avait réuni deux mondes forçant les habitants de chaque monde faire une rencontre fracassante et à vivre, malgré eux, en communauté. Un chamboulement mondial qui prendra des siècles à se stabiliser. Enfin, passons, le moment philosophique n’était pas forcément le plus approprié en cette journée pluvieuse. Étrange coïncidence ? Me voici songeur. Il est bon d’être pragmatique, mais ne devrions-nous pas mettre des limites ? Jusqu’où suis-je prêt à aller pour mes intérêts ? Lié ma vie à une parfaite inconnue pour le bien-être de mes projets ? Me suis-je laissé influencer par mes associés et ma famille ? Tant de questions et pourtant si peu de réponses claires.

Nous voilà à l’aube d’une nouvelle alliance familiale. D’un côté, une grande et puissante famille d’originaire de Russie en leur possession de grands moyens et de l’autre côté ma famille ainsi que moi, mes associés et mon entreprise. J’avais en ma possession de la connaissance, des projets, des idées et des prototypes à exploiter, par contre et malgré mon aisance financière, mes conseillers ainsi que ma famille, m’avaient-ils convaincu de trouver un nouvel associé pour garantir la suite de notre développement. Lorsqu’on me proposa de m’associer avec un investisseur étranger qui était intéressé par nos travaux et nos réussites industrielles ayant une importante valeur sur le marché civil comme militaire et donc une forte rentabilité du fait des clients possibles. Il est vrai que ce rapprochement avait un certain nombre de conditions et c’est là que je me suis demandé si c’était vraiment raisonnable. Pour commencer, une partie des parts de l’entreprise allait revenir à notre futur partenaire afin de lier dans le temps cette alliance. Conséquence directe est que je perdais les pleins pouvoirs sur l’avenir de ma propre entreprise et de deux, un mariage a été étudié pour créer un lien familial entre une famille millénaire et ma famille, du moins moi et mon entreprise.

Vous savez, nous étions tous deux fort à notre manière. La puissance d’une famille vampire millénaire et la puissance d’un patron industrielle. Il y avait beaucoup de choses qui nous différenciaient. Que ça soit la race, le niveau et l’origine de notre richesse, notre culture et notre éducation. Non pas qu’il y avait un meilleur que l’autre, mais nous étions foncièrement différents et pourtant me voilà fiancé à l'une de leurs filles afin de créer un lien indéfectible par le lien du mariage faisant de nos futurs descendants les héritiers de nos héritages respectifs.

Nous étions arrivés au jour de notre rencontre. Il ne m’a pas été simple pour avoir un minimum d’information concernant ma promise. Je ne sais pas pourquoi, mais je sentis qu’il y avait un certain nombre de cachotteries de la part de ma « future belle-famille ». Allons bon, rien n’était encore fait, beaucoup de documents de signés, beaucoup d’accord et de promesse, mais qu’ils ne seraient valables qu’au moment de la signature de notre acte de mariage, ce qui n’était pas encore fait.

En-tout-cas, mes associés et ma famille, ainsi que la famille de ma fiancée, avaient dépensé sans compter, comme dit l’expression. C’était grandiose, raffiné, un mélange de ce qu’on faisait de mieux dans la culture française, russe et norvégienne. Que ça soit dans la décoration que dans les plats et les boissons. Il émanait de ce lieu la richesse et le luxe sans pour autant que ça soit dans la démesure et dans la vulgarité. Malgré ça, je trouvais qu’on en faisait un peu trop. Il est vrai que c’était notre première rencontre et que tout le monde voulait que cela se passe au mieux et cela montre un aperçu de la vie que nous pourrions avoir si cette rencontre aboutissait à l’accord de ce fameux mariage. Tous les moyens sont bons pour influencer les concerner vers la voie qui leur a été choisie. Étais-je contre ce mariage ? Disons que je me suis laissé emporter par les vagues et me voilà échoué sur ce mariage qui ne manquait pas d’intérêt et d'avantage divers et varié, mais à quel prix ?

Me voilà en haut de ce building à la somptueuse réception. Je m’étais mis sur mon trente-et-un. Bien que mon costume trois-pièces puisse sembler simple, la qualité était demie ainsi que sa valeur. Les couleurs étaient classiques, une chemise blanc cassée, une cravate de couleur bordeaux rayée, un gilet, un veston et un pantalon de couleur noir bleutée rayées à l’horizontale et une paire de chaussures de soirée en cuir marron. J’attendais ici mon invité avec qui je devais partager mon existence éphémère. Ce mot fâcha ma famille qui voyait en cette alliance familiale, la possibilité de changer et de devenir autre chose que les humains que nous sommes… Quelle ingratitude envers nos ancêtres…

Alors que mon esprit voyageait d’idée en idée, de supposition en supposition, de doute en doute, je sentis comme une main sur mon dos et une douce voix qui me fit sortir immédiatement de mes songes. Je tournais mon regard vers la demoiselle… Que dis-je ? Ma promise. Deux choses m’interpellèrent rapidement. La délicatesse de la voix correspondait bien à la ravissante demoiselle qui se présentait à moi. Son élégance, son maquillage et sa tenue, tout cet ensemble lui donnait une prestance et un charme des plus fantastiques. Je ne pouvais pas dire que je n’étais pas troublé par cette beauté mise en avant pour cette rencontre. La seconde chose qui m’interpella, c’était son souhait de trouver un arrangement. Il faut croire que je n’étais pas le seul septique de ce mariage d’intérêt.

Je lui fis face et mon regard plongea dans le sien avant d’observer discrètement notre environnement, et comme il fallait s’y attendre, nous étions observés par toute la famille. Je me concentrais à nouveau mon attention sur cette ravissante Yume. Je reculais d’un pas et je lui pris sa main avant de m’incliner de façon élégante en avant pour me présenter :

– Enchanter ma chère Yume. Oui, je suis bien Monsieur Renard, mais vous pouvez m’appeler par mon prénom, Victor.

Je lui déposais un léger baisé sur le dos de sa main avant de me redresser. Je me mis à côté d’elle et je l'invitais à prendre mon bras :

– Et si nous allions discuter en priver ma chère pour faire plus ample connaissance.

Je la dirigeais doucement vers une salle, un peu éloignée de la foule qui servait de bureau en temps normal. Je la fis rentrer et je dis à un des réceptionnistes calmement avec une pointe d’autorité :

- J’aimerais m’entretenir avec Mademoiselle Yume, je désirerais de ne pas être dérangé.

– Bien Monsieur Renard, comme vous le souhaitez.

Je le remerciais d’un hochement de tête avant de fermer la porte derrière moi et de la verrouiller. Il y avait un bureau, un fauteuil, une chaise et un petit divan au fond de la pièce. Je me dirigeais vers le fond et je l’invitais à s’asseoir avant de m’installer. Je repris la parole tendrement :

- Permettez-moi de vous dire que vous êtes de grande beauté en cette soirée. Je suis désolé que notre rencontre se soit faite sur ce mariage tant attendu par nos deux familles.

Ce mariage arrangé laissait dans son sillage une atmosphère plutôt pesante. C’était notre première rencontre et nous devions nous préparer pour de futures rencontres pour essayer de nous rapprocher et de signer un contrat de mariage au bout. J’étais assez partagé sur le fait de me marier pour ses raisons et j’avais l’impression qu’il était de même pour Mademoiselle Yume.

– Je me suis permis de vous emmener ici pour pouvoir discuter de ce sujet sensible en toute intimité entre les personnes concernées au premier plan de ce mariage. Je suis à votre écoute ma chère, parler sans risque.

Était-ce un peu osé, de ma part, de nous avoir fait éclipser du reste des personnes présentes ? Il se pourrait, mais je préférais de loin des premières rencontres en toute tranquillité et pas sous les yeux intéressés de dizaines d’individus. Pour un petit peu de temps, nous allions pouvoir parler franchement sans éléments perturbateurs. Hélas, cela ne saurait durer trop longtemps, notre absence du reste des invités pourrait attirer l’attention ou l’inquiétude des autres sur nous. J’attendis patiemment qu’elle prenne la parole et de voir où tout cela allait nous mener.

Ce jour avait comme principe de base de voir si Mademoiselle Yume et moi, allions pouvoir accéder à la requête de nos familles respectives qui était de nous unir par le lien du mariage afin de renforcer une fusion d’entreprises. Vous savez, il est recommandé de ne pas mélanger la vie de famille et vie professionnelle pour le bien-être des personnes, nous y étions très loin de cette notion. Bien que notre rencontre fût préparée en avance et que tout a été mis en œuvre pour rendre cette situation délicate le plus agréable possible. Il est toujours difficile de faire naître des sentiments et des envies au premier regard. Il est vrai que le « coup de foudre », comme dirait certain, aurait pu peser dans la balance, mais il ne fut rien. Aussi ravissante qu’elle fût et bien qu’elle respectât tous les codes de la haute société… Je pouvais apercevoir un automatisme qu’on lui aurait implanté dans son cerveau. Pourquoi je dis cela ? Peut-être que cela pourrait vous surprendre, mais le manque d’imperfection est un manque de naturel. Nous, les êtres vivants, nous sommes imparfaits et nous sommes influencés par un grand nombre de paramètres variables, comme nos émotions, notre caractère, notre environnement et ainsi de suite qui fait que nos agissements et pensées ne seront pas sans défauts. C’est comme service une tasse de thé pendant un tremblement de terre. Il n’y aura pas de thé que dans la tasse, l’action n’est pas parfaite. Non pas que je reproche quoi que ce soit à ce sujet la concernant, car il était de même pour moi, mais il n’y a pas eu et il n’y aura pas de vibration dans mon être envers cette charmante demoiselle. La raison de notre rencontre est bien trop matérielle qu’émotionnelle, ce qui pour un mariage, liant deux vies ensemble pour longtemps, n’était pas acceptable.

Très rapidement, ce rendez-vous se changea en une réunion de négociation et d’affaires entre deux parties. Elle avait tout préparé afin de trouver une porte de sortie à ce mariage et espérer que les intérêts financiers et matériels allaient balayer la notion de mariage. Impressionnante, elle était une femme au corps presque fébrile, mais qu’il ne fallait pas sous-estimer son esprit combatif et son intelligence à adapter la situation dans son intérêt. Elle était pleine de surprises et elle montra une grande capacité d’analyse et de négociation dans le monde des affaires.

Je l’écoutais patiemment et j’analysais dans mon esprit chacune de ses argumentations. Je ne pus que sourire face à son exposé et à son approche physique pour pouvoir faciliter ses explications avec son hologramme. Elle montrait autant de vivacité dans les négociations que son père.

Bien que ce fût la première fois que nous nous voyons, elle a su gagner, sans le savoir, un certain respect de ma part. Elle était franche, directe et fidèle à elle-même. Je pouvais comprendre son désarroi face à ce mariage et aux raisons qui ont poussé nos deux familles à vouloir tout cela. Elle a su, à travers sa proposition, comprendre sans que je ne lui dise, ma volonté à rester maître à bord de ma propre entreprise. Une femme intelligente, réaliste et déterminée. Elle ira sûrement loin dans la vie.

Lorsqu’elle finit de me présenter sa proposition dont je ne détachais aucune seconde de mon attention, je me frottais le menton en signe de réflexion avant de poser mon regard dans le sien avec un petit sourire au coin :

– Il est vrai que votre proposition, ma chère Yumi, est des plus détaillées et intéressantes. Elle permet de protéger au mieux les intérêts de chacun sur le long terme avec l’aide de compromis tout à fait acceptable. Mais vous devez vous douter que je vais devoir, malgré tout, prendre un temps de réflexion et de déposer votre proposition devant mes experts juridiques pour avoir un second avis sur la question.

Je ne m’attendais pas à cette dernière remarque. Une petite justification tout à fait compréhensible, mais je ne pus retenir un petit rire amical. Je pris une grande respiration et doucement, je lui pris une main chaleureusement et je l’observais quelques secondes avant de remonter mon regard pour admirer ses yeux. Ce petit soupire et cette tête secouait m’avaient légèrement intrigué. Elle semblait perturber pendant ce court laps de temps alors que du début à la fin de ses explications, elle ne montra aucun signe de ce genre.

– Mademoiselle Yume… Soyez-en assuré. Je partage le même avis que ça soit sur ce mariage que sur les raisons qui feraient que nous commettrions une énorme erreur de nous lier par le mariage pour satisfaire les envies et projets d'autres individus. Il est étonnant que nos deux familles soient aussi attachées par ce mariage qui ne saurait tenir par manque d’un élément essentiel qui est l’amour.

Je fis une pause de quelques secondes. Ma parole, ainsi que mes gestes, étaient des plus tendres et affectueux. Non pas par amour, mais par compassion de la situation dans laquelle nous étions. Je l’observais attentivement, mes pensées qui se perdirent pendant un court instant dans son regard. D’un geste incontrôlé, ma seconde main alla lui remettre une petite mèche de cheveux qui s'était glissée devant son œil pendant notre conversation. Je repris la parole doucement :

– Notre nature nous empêche de nous soumettre à la volonté des autres voulant nous enchaîner contre notre gré. Vous êtes une femme bien trop déterminée et intelligente pour tomber dans ce piège de mariage arrangé et je vous comprends. Je n’avais pas l’intention d’accepter. Pourquoi suis-je ici ? Pour faire plaisir et montrer que j’aurais au moins essayé… Le refus de ce mariage s’accordera à nos envies et pensées, mais il sera source de déception pour un grand nombre de personnes. Sommes-nous prêts à leur faire face et à encaisser les conséquences possibles ?

Je refis une petite pause pour lui laisser le temps à la réflexion, mais pas le temps de pouvoir me répondre tout de suite. Je lui libérais la main avant de m’adosser au divan. Je fermais les yeux et je me frottais doucement l’arrière de ma tête. Cela m’aidait à mieux réfléchir et, dans certains cas, à canaliser des émotions comme la colère ou le stress. Je me redressais par la suite et en regardant dans le vide, je dis :

– Je suis prêt à vous suivre, pour nos intérêts communs et aussi pour laisser cette place de partenaire de vie à une personne méritante. Le seul bémol de votre proposition est par rapport à la… Gourmandise possible de votre famille du côté des parts d’entreprises. Non pas que je doute en vos capacités de réussir, mais juridiquement parlant, c’est un peu léger. Et si vous ne parveniez pas à gérer cela ?

Je lui souris doucement pour montrer que cette conversation restait dans le domaine de l’amical. Dans le monde des affaires, il était difficile de se baser sur une promesse orale sans contrepartie en cas d’échec. Cette situation pourrait bien se retourner contre moi si je venais à perdre trop de parts d’entreprise. Vous pouvez être à la tête de la plus grande puissance du monde, vous pouvez être évincés en perdant le contrôle de ce qui vous entoure. J’étais conscient que je manquais d’expérience par rapport aux camps d’en face. Même si elle était contre ce mariage, elle ne restait pas moins une fille de la famille qui veut s’unir au mien. J’avais l’impression que ce mariage allait donner plus l’ascendant à cette famille qu’à moi en les laissant s’immiscer au sein de ma famille et de mon entreprise. Dans un couple, dans un groupe, dans une famille, il y a toujours un qui a le dessus sur l’autre, un plus heureux que l’autre, un qui contrôle plus que l’autre… Serais-je le dominer ou le dominant ? Le maître ou le serviteur ?

Le paraître est quelque chose de très important. Je m’alignais, en grande partie, sur ses pensées qui étaient en accord avec mes intérêts. Il est vrai que je m’inquiétais d’une perte de contrôle, que ça soit dans ma vie privée que professionnelle. J’avais en face de moi une grande famille de vampires qui ne manquait pas d’influence et de puissance. Cette influence ne connaîtrait plus de frontière au sein de ma famille et de mon entreprise si nous venions à fusionner sachant qu’ils ont l’avantage du temps alors que moi, le temps ne fera que m’affaiblir, me rendant vulnérable et à la merci de cette famille qui ne manquait pas d’ambition et de détermination pour que tout se passe selon leur plan. Je ne peux leur reprocher cela, car il est de même pour moi. La différence, c’est que je suis humain et eux vampires, ce qui fait que j'ai un certain handicap, si on peut dire, face à eux. Malgré tout, cette jeune demoiselle était différente. Elle voyait plus loin que les intérêts financiers, elle voyait son bien-être personnel, ce qui n’est pas rien.

- Qu’en pensez-vous de tout cela ?

Il était temps d’avoir l’avis de la concerner sur tout cela. Il est vrai que sa stratégie était prometteuse. En se fiant à son étude, statistiquement parlant, c’était viable, mais je me devais de regarder cela de mon côté avec mes associés et conseillés pour une analyse plus approfondie. Avant toute chose, je voulais être sûr que nous étions bien accordés sur la question du mariage avant.

Connaissez-vous cette fameuse impression qui explique que nous choisissons nos amis et non notre famille ? J’ai toujours trouvé assez ironique de constater que nous n'avons aucun contrôle sur les membres de notre famille alors que c’est avec eux que nous allons naître, grandir, être éduqué, aimer ou haïs et qui vont nous donner les fondations de notre future personne. Sans oublier qu’il y aura cet héritage génétique que nous n’aurons pas d’autres choix que de faire avec. Oui, je dessine un tableau plutôt noir, mais il n’y a pas que des inconvénients, il y a aussi du bon. Il nous faut apprendre à accepter qui nous sommes, ce que nous sommes et transformer ce qui pourrait être une faiblesse en force. Il est vrai qu’il est plus facile de le dire que de le faire. Il faut avoir une grande force de caractère et d’esprit pour forcer le changement.

Plus notre conversation progressait, plus chacun en apprenait un peu plus sur l’autre. Ce qui n’était pas mal en soit vu que c’était le principal objectif de cette rencontre. Il est vrai que notre conversation tourna autour de négociation et de futur accord possible en plus de la découverte de chacun. En fait, c’était à l’image de notre situation. Je pouvais constater que cette charmante Yume était dans une situation familiale bien plus désagréable que moi. Je n’avais pas tous les détails, mais par sa façon de présenter sa situation et l’histoire de ce mariage arrangé souhaité par nos deux familles… Je ne pus empêcher un petit soupir de désapprobation sur sa situation au sein de sa famille.

Il était admirable de constater qu’elle était une femme déterminée, qui avait de la suite dans les idées pour arriver à ses fins et du courage. Vous savez, la définition de la famille est propre à chacune et nous pouvons constater des similitudes entre les familles selon leur place dans la société et chaque famille développe et favorise, à leur façon, leur principe et règle. Nos familles avaient la même vision sur les moyens pour pouvoir mieux s’enrichir, et cela, au détriment de notre bonheur personnel.

Je continuais à l’écouter avec une certaine admiration sur sa façon de présenter les choses. Elle savait jongler entre les intérêts de chacun afin de donner une apparence acceptable à tous les partis concernés par cette affaire. Impressionnante pour ne pas dire terrifiante… Elle était une négociatrice très talentueuse… Et surtout prête à aller très loin pour la réussite, jusqu’à m’expliquer comment assurer mes arrières en l’utilisant contre sa propre famille si je venais à me retrouver dans une position délicate. J’avais l’impression que l’atmosphère avait pris une pointe de mélodrame et sa façon de se tenir devant la baie vitrée ne faisait que renforcer cette sensation.

Je me levais du divan et je remis mon costume correctement et je la regardais en plissant légèrement les yeux… Mes pensées s’agitèrent… Un court instant de déstabilisation m’occupa… Je pense que je fus attristé pour elle…

Je m’approchais lentement d'elle, mes mains croisées derrière le dos et je me mis à sa droite et j’admirais à mon tour l’extérieur en soupirant longuement. Je pris le temps d’une petite réflexion. Tout en regardant dehors, je pris la parole d’un ton calme et posé :

– Ma chère Yume… Il serait trop tôt pour dire que je vous fasse toute confiance… Mais je vois en vous une personne prometteuse… Comme votre proposition…

Je lui fis face d’un geste lent… Je la regardais profondément dans ses yeux… Je lui fis un petit sourire comme pour la rassurer… Je glissais le dos de ma main sur sa joue tendrement et ma seconde main lui prit la sienne et je lui dis chaleureusement :

– Mais je dois vous avouer qu’une nouvelle inquiétude a fait son apparition… C’est à votre sujet et sur votre avenir… Il ne suffit pas de dire aux personnes de ne pas s’inquiéter pour qu’elles le fassent.

Je ris doucement et je reculais d’un pas avant de regarder l’extérieur avant de monter le regard pour regarder le ciel.

– Vous êtes pleines de surprises et je suis navré que votre famille vous traite ainsi. Elle n’est pas consciente de la chance qu’elle a de vous avoir à leurs côtés. Il est vrai que nous ne pouvons pas dire que nous nous connaissions, mais pendant ce peu de temps que nous avons partagé jusqu’à présent, vous m’avez impressionné et il en faut pour le faire.

Je ris doucement et en restant face à la vitre, je tournais mon visage dans sa direction avant de reprendre.

– Je ne saurais dire de quoi sera fait notre avenir. Ni dans quelle direction va prendre cette alliance entre nos deux familles, et cela, sans ce mariage. Mais je puis vous souhaiter la réussite et de trouver la bonne personne qui saura vous aimer et vous accompagnez dans votre vie.

Il n’y avait plus de doute sur le fait qu’il n’y aura pas de mariage. Par contre, pour le reste, seul l’avenir nous le dira. Ma réflexion sur cette alliance était encore en cours. Je devais encore peser le pour et le contre et si oui, pour combien de temps ? Des questions plus professionnelles qu’autre chose. Je me dis que tant je suis vivant, je pourrais toujours marcher vers mes objectifs avec plus ou moins de facilités selon les ressources en ma disposition. Et cette chère Yume… Quel avenir s’ouvre à elle ? Le temps nous le dira. Je le suppose…

Une étrange rencontre avait lieu en ce moment même. Mademoiselle Yume Akumu et moi-même avions ce rendez-vous à honorer à la demande de nos familles respectives. Un rendez-vous où chaque parti avait des attentes de leurs enfants afin de réaliser un désireux projet ayant comme promesse un apport financier des deux côtés. En réalité, l’espoir de chacun était basé sur une possible entente entre Yume et moi qui nous aurait dirigés doucement vers une acceptation commune de joindre nos vies. Tous les moyens ont été mis en œuvre pour forcer à cette union. Que ça soit dans la présentation de chacun, dans le choix du lieu pour nous faire rencontrer ainsi que le décor et les mets mis à notre disposition. Il est vrai que des mariages arrangés, des alliances par ce billet ont déjà eu lieu par le passé, mais aussi de nous jours, mais faudrait-il que nous soyons enclins à accepter ce genre d’accord. Les origines de ma famille sont, en réalité, de la classe moyenne, ce genre de façon de faire est plutôt rare. Notre situation s’est vue progressée et améliorée avec l’aide de ma réussite. Méfiez-vous des petites personnes qui deviennent grandes avec l’argent, ils sont bien pires et orgueilleux que ceux qui sont depuis longtemps. Mais qui suis-je pour leur refuser le fait d’essayer ?

En-tout-cas, ce fut une agréable surprise et en ce peu de temps que nous avons pu partager, elle et moi, j’ai pu développer une véritable sympathie pour la ravissante demoiselle qui m’était promise. J’étais sincèrement attristé par sa triste situation au sein de son foyer. À l’inverse d’elle, j’étais plus en position de dominant que de dominer au sein de ma famille, bien que cet avantage soit plutôt fragile, car ils avaient le nombre. Enfin, passons.

Je devais avouer une chose. J’étais bien plus chamboulé et intrigué par cette rencontre que je l’aurais voulu et prévu. Bien que je laissasse une certaine attitude d’attention et de tendresse s’exprimer envers elle à travers mes doux gestes et mes mots tendres tout en préservant une certaine distance respectueuse, elle avait su me toucher émotionnellement ce qui était devenu rare depuis mes vingt et un an.

Voilà, qu’à la fin de son souhait à mon égard, elle me remit une mèche de cheveux rebelle derrière mon oreille. Je fus touché par ce petit geste de sa part. L’importance n’est pas le prix, les efforts ou le temps apporté à un cadeau ou un geste qui vont forcément apporter de l’importance, mais ce sont les motivations et les sentiments qui sont derrière qui vont apporter ce fameux plus valu. Je la laissais agir à son gré, mais je pouvais constater à travers ses yeux et les traits de son visage qu’elle était méditative et pas qu’un peu. Naturellement, ma main se déposa sur la sienne se trouvant près de mon visage et je le serais tendrement avant d’y poser ma joue dessus en fermement deux secondes mes yeux sentant la douceur de sa main sur ma joue. Je souris doucement avant d’ouvrir les yeux et de poser mon regard dans le sien tendrement. Je fis redescendre doucement sa main se trouvant sur ma joue avant de monter ma main libre vers son visage.

– Laissons le temps faire son œuvre et nous verrons bien ce que l’avenir nous apportera. Malgré l’incertitude du lendemain, j’ai acquis une certitude à votre sujet ma très chère Yume…

Je la regardais chaleureusement. Ma main libre atteignit son visage et effleura des bouts des doigts sa joue. Mes doigts se glissèrent jusqu’à son menton que je le saisis avec une grande délicatesse. Je me rapprochais d’un pas vers elle et lentement, mon visage se rapprocha du sien.

– En ce jour, vous vous êtes fait un allié et je serais à votre disposition si le besoin se faisait sentir…

Sans prévenir et sans réflexion complémentaire, je fis déposer mes lèvres sur les siennes. Un doux baiser qui scellerait et officialisait nos accords et cette alliance. Cela durera quelques secondes avant que je le rompisse et que j’éloignais légèrement mon visage du sien, surpris par mon propre geste.

– Veuillez m’excuser de ce geste déplacé sans avoir demandé votre accord avant.

Il n’était pas du tout dans mes habitudes d’agir ainsi. Je fus moi-même perturbé par mon geste des plus affectifs envers cette personne à qui nous avions discuté longuement sur un accord pour nous éviter un mariage et nous forcer un quelconque rapprochement voulût par nos familles.